Ico et Luisa Parisi, architectes
Ico Parisi (1916-1996) et son épouse Luisa Parisi (1914-1990) sont avec Gio Ponti, Carlo Mollino et Carlo De Carli les principaux artisans de l’invention et de la promotion de ce qu’il est convenu d’appeler le « style italien » des années 50.
Dépourvu de tout dogmatisme, irréductible aux étiquettes, esprit libre, éclectique et avide de collaborations avec ses contemporains, Ico Parisi a traversé le XXème siècle avec pour seule ambition la réalisation de sa vocation d’artiste complet. Architecte, designer, peintre, sculpteur, céramiste, il a concrétisé par son travail, pendant plus de cinquante ans, l’idéal poursuivi par toute sa génération : celui de l’intégration des arts entre eux, l’ « Unità delle arte ». Il est en cela le plus fidèle élève de Gio Ponti. Comme lui, toujours à l’écoute de son temps, il a su, grâce à son exceptionnel talent artistique, donner une interprétation, alors exemplaire, de la modernité, à tel point que ses créations sont aujourd’hui absolument emblématiques, non seulement de son style mais aussi de celui de leur époque, décennies après décennies.
Les tables et les consoles créées entre 1947 et 1954, pour la firme Singer & Son et pour la Galerie Altamira à New-York, constituent, au même titre que celles de Mollino, les exemples les plus typiques du design organique et aérodynamique de l’après-guerre.
De la même façon ses œuvres cinétiques des années 60 et 70 témoignent d’une active participation aux courants artistiques les plus avant-gardistes de son temps.
Toute sa vie, Ico Parisi est resté fidèle à la ville de Côme, la patrie d’adoption de son père, peintre d’origine palermitaine. Il y grandit et baigne, dès les années 30, dans l’effervescence artistique qui électrise cette petite station balnéaire à deux pas de Milan. C’est à Côme qu’il assiste à l’érection d’un des chefs d’œuvres de l’architecture moderniste : la Casa del Fascio de Giuseppe Terragni, symbole du mouvement rationaliste en Italie. C’est là aussi que le même Terragni fonde en 1935, le Groupe de Côme (Gruppo Como) réunissant des artistes de toutes disciplines autour d’une seule et même foi dans l’abstraction (notamment Melotti, Fontana, Radice, Rho, Galli, Sartoris et Lingeri). Cette leçon d’interdisciplinarité, cette ferveur partagée dans un même idéal de travail en commun, Parisi ne l’oubliera jamais.
Ico et Luisa Parisi se sont investis à tous les niveaux de la production industrielle ou semi industrielle de meubles en série (Cassina, MIM à Rome et Singer & Son à New-York), mais aussi dans la fabrication artisanale de pièces uniques ou en éditions limitées ( Studio La Ruota fondé avec sa femme Luisa à Côme, après la guerre, les ébénistes de Cantù pour certains meubles présentés chez Altamira à New-York).
Le Studio la Ruota créé en 1948, était un laboratoire de pièces uniques de très haute qualité: lampes et objets émaillés par Paolo De Poli, meubles de commande avec des décors de Radice et le plus souvent en collaboration avec les artistes italiens issus de l’abstraction géométrique mis en relation avec des artisans du plus haut niveau : céramique, dinanderie, émaux, pour produire des pièces en collaboration avec le Studio et des intervenants parfois étrangers (scandinaves, par exemple).
Ico Parisi disparaît en 1996, laissant aux générations futures son œuvre comme une formidable leçon d’optimisme : trop peu d’artistes ont réussi dans la voie tracée dès 1860 par les pionniers du design, celle du rapprochement entre les arts, celle aussi de l’adéquation du beau et de l’utile, pour ne pas saluer comme il le mérite, un succès qui réside essentiellement dans cette maxime dont, comme Gio Ponti et Carlo De Carli, il aurait pu faire sa devise : « Fare ensieme per vivere ensieme ».